La découverte fortuite d’un tableau de Rosa Bonheur dans une petite église de la Sarthe a impulsé une étude d’inventaire de la peinture religieuse de chevalet en Pays de la Loire.
Plus de 3 000 œuvres ont été repérés par les chercheurs de la Région dans les 5 départements – Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Mayenne, Sarthe et Vendée. L’objectif est de les redécouvrir pour les valoriser, voire de les restaurer pour les transmettre.
L’inventaire des peintures religieuses en Pays de la Loire, réalisé dans le cadre d’une opération de recherche 2020-2028, vise à recenser exhaustivement les œuvres conservées dans les édifices religieux catholiques de la région. Cette étude écarte les édifices monastiques pour se concentrer sur les églises paroissiales, cathédrales, basiliques et chapelles, sur divers supports (toile, bois, métal…). L’enquête mobilise une méthodologie pluridisciplinaire et collaborative entre la Région, la DRAC et les départements, avec un appui cartographique (SIG) pour une gestion rigoureuse des données.
3 192 œuvres recensées dans 1 782 édifices

Au terme du repérage exhaustif de 1 782 édifices, plus de 3 192 œuvres ont été recensées, principalement concentrées dans la Sarthe et le Maine-et-Loire. 42 % des œuvres sont protégées au titre des monuments historiques. Leur état de conservation est variable selon les départements.
La Fuite en Égypte, Rosa Bonheur, 1839. Église Saint-Martin de Chenu, Sarthe. ©J.-B. Darrasse
De rares œuvres anciennes
Les œuvres des XVe-XVIe siècles sont rares mais de qualité, influencées par les écoles tourangelle, parisienne, flamande et italienne. Les oeuvres majeures sont le retable Beaussant (XVe siècle, cathédrale d’Angers), le triptyque de saint Jean-Baptiste à Laval (maniérisme flamand), et des œuvres s’inspirant de Tintoret le Jeune ou Bonifacio Véronèse.
Retable Beaussant, cathédrale Saint-Maurice d’Angers (XVe siècle) : peinture sur bois, exemple rare de peinture religieuse ancienne régionale. © Conseil départemental de Maine-et-Loire – Conservation départementale du patrimoine


Une peinture florissante aux XVIIe et XVIIIe siècles

Sous l’influence de la Réforme catholique, la peinture classique française s’impose, avec des artistes et ateliers locaux (Mathurin Bonnecamp, famille Besnard) et des œuvres de maîtres comme Philippe de Champaigne. L’iconographie mariale domine, avec notamment la dévotion au rosaire, de même que la représentation de saints locaux.
Jésus et ses parents au Temple, par Onésime Bariller d’après Philippe de Champaigne. (1655, Saumur). © Conseil départemental de Maine-et-Loire – Conservation départementale du patrimoine(c) Région Pays de la Loire – Inventaire général. A. Maugin

La Nativité avec les prophètes, Mathurin Bonnecamp, vers 1625, église d’Amné-en-Champagne (72). © Région des Pays de la Loire. Inventaire général. J. Minier
L’explosion de la production au XIXe siècle
la reconstitution du mobilier des églises après la Révolution et les commandes de l’État font exploser la production au XIXe siècle. Les copies d’après les modèles des peintres anciens se diffusent via le Salon et la politique de mécénat. Les artistes notables sont Hippolyte Flandrin, Jules-Élie Delaunay, Rosa Bonheur (première œuvre connue). La peinture saint-sulpicienne est reproduite en série pour la dévotion populaire.
La Tentation du Christ, Armand Cambon (1852, Craon) : œuvre exposée au Salon, témoignant du XIXe siècle académique. © Région Pays de la Loire – Inventaire général. T. Seldubuisson

Le renouvellement esthétique des XXe et XXIe siècles

Le renouvellement esthétique est marqué par le symbolisme, le modernisme, et l’usage innovant des matériaux (résine, feuilles d’or). Les artistes engagés dans le renouveau de l’art sacré sont Germaine Le Cler, Valentine Reyre. Les œuvres contemporaines explorent abstraction et hyperréalisme. Les chemins de croix sont nombreux, souvent issus de modèles commerciaux et parfois inspirés d’un renouveau artistique à l’instar de Xavier de Langlais.
La Nativité, Germaine Le Cler (1935, église Notre-Dame de Sévremont 85) : exemple du renouveau de l’art sacré au XXe siècle. © Région des Pays de la Loire. Inventaire général. T. Seldubuisson

Cette vaste étude révèle un patrimoine riche et varié, mêlant œuvres majeures et créations locales, originales ou copiées, témoignant de la vitalité de la peinture religieuse en Pays de la Loire à travers les siècles. Elle souligne également l’importance de la conservation, de la restauration et de la sensibilisation, notamment par des initiatives pédagogiques impliquant les lycéens dans la sauvegarde du patrimoine.







